Le Conseil des ministres a approuvé le 29 mars 2012 un projet d’arrêté royal fixant les missions et conditions de nomination des conciliateurs sociaux dans le secteur public. Le texte doit encore être soumis à l’avis du Conseil d’Etat, ce qui ne sera pas nécessairement une simple formalité.
Le projet d’arrêté exécute la loi du 29 mars 2012 (loi portant des dispositions diverses) qui modifie la loi de 1974 fixant le statut syndical dans le secteur public. Le nouvel article de loi attribue à la Direction générale des relations collectives du travail du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale « … la concertation dans le secteur public en vue de prévenir, suivre et régler les différends entre les employeurs et les membres du personnel ... ». A cette fin des conciliateurs sociaux seront nommés à la Direction générale des relations collectives de travail.
Le protocole n°170/1 relatif au dialogue social dans le secteur public conclu en Comité A [1] de négociation le 19 avril 2010 est à l’origine de cette dynamique législative. La procédure de conciliation s’inscrit dans le contexte d’une autorité politique souhaitant encadrer le droit de grève pour assurer la continuité du service public.
A ce stade du dossier, quelques commentaires ou questionnements peuvent être émis. Tout d’abord, on peut s’étonner, sur un plan procédural, que la loi fixant le statut syndical ait pu être modifiée par le biais d’un amendement parlementaire en commission des Affaires sociales, et ce sans négociation préalable avec les organisations syndicales représentatives. Il s’agit d’un précédent potentiellement dangereux qui revêt un aspect d’autant plus paradoxal que le nouveau texte vise à renforcer le dialogue social.
Sur un plan juridique, de nombreuses inconnues subsistent. En effet, les éléments essentiels de la conciliation sociale ne sont apparemment pas prévus dans le projet d’arrêté. Ainsi la nouvelle notion de conciliation sociale n’est pas définie. De même la procédure de conciliation doit encore être fixée par le Comité A ce qui ne lierait que moralement les organisations syndicales qui y siègent et encore moins celles qui ne sont pas représentées. Par ailleurs, comment organiser la procédure de conciliation et de quelle manière les conciliateurs sociaux auront-ils une connaissance du secteur dont ils seront amenés à s’occuper ? Le secteur privé ne connaît pas ce genre de difficulté du fait que les conciliateurs sociaux participent à l’activité des commissions paritaires. La question du délai de préavis annonçant une cessation concertée du travail n’est semble-t-il organisée que dans le protocole du Comité A de 2010.
Comme on peut l’observer, de nombreux problèmes techniques mais aussi de fond, sont encore en suspens dans ce dossier sensible des relations sociales dans la fonction publique.
Enfin, on notera que l’éparpillement des règles par secteur limite le champ d’application et la portée concrète de ce dossier des nouveaux conciliateurs sociaux (cf. le cas du conciliateur social propre aux services extérieurs de la sûreté de l’Etat instauré par une loi du 17 mars 2004 et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré structuré à deux niveaux qui fixe les modalités légales d’exercice du droit de grève pour les seuls fonctionnaires de police).
Dossier à suivre donc plus particulièrement dans le cadre du dialogue social au sein des établissements pénitentiaires…
Alexandre Piraux