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Accueil du site - Revue Pyramides - NumĂ©ros parus - Pyramides n°20 - Copernic, dix ans après - Allocution d’ouverture au colloque du CERAP (14 mai 2009)

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PAR LE VICE-PREMIER MINISTRE ET MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DES ENTREPRISES PUBLIQUES ET DES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES, STEVEN VANACKERE

Comme dans la plupart des pays europĂ©ens, la fonction publique belge a Ă©voluĂ© considĂ©rablement ces dix dernières annĂ©es Ă  cause de l’importance accrue de la pensĂ©e Ă©conomique dans notre sociĂ©tĂ©, sa libĂ©ralisation et son individualisation.

Les services publics doivent être en mesure de démontrer leur légitimité, pas seulement sur base de leur mission légale, mais aussi en termes d’efficacité, d’efficience, de transparence et d’orientation vers le client.

Le citoyen qui fait davantage valoir son point de vue, ne se voit absolument pas en tant qu’une personne « soumise » Ă  l’autoritĂ© mais exprime des exigences importantes en termes de rapport qualitĂ©/prix et de faire plus avec moins.

Les fonctionnaires actuels et futurs sont de plus en plus qualifiĂ©s, changent plus frĂ©quemment d’emploi, s’attendent Ă  ce que l’employeur les conseille et les aide Ă  se dĂ©velopper, cherchent de l’harmonie entre leurs propres valeurs et celles de leur employeur, demandent un bon Ă©quilibre entre le travail et la vie privĂ©e, accordent beaucoup d’importance Ă  une innovation et un progrès qui vont de pair avec le dĂ©veloppement durable, le respect de l’environnement, la diversitĂ©, le bien-ĂŞtre…

Cet impact croissant de l’aspect individuel et/ou culturel sur l’environnement de travail se voit encore renforcĂ© par un marchĂ© du travail Ă©triquĂ©. La guerre des talents bat son plein. En plus, le nombre des jeunes qui se prĂ©sentent sur le marchĂ© du travail, diminue continuellement par rapport au nombre de personnes atteignant l’âge de la pension. Rien que pour l’administration fĂ©dĂ©rale, 44% des fonctionnaires vont prendre leur retraite dans les dix annĂ©es qui viennent. Il faut s’armer pour faire face Ă  ce dĂ©fi.

Ceci n’est qu’une sĂ©lection des facteurs externes qui mettent le fonctionnement de l’administration sous pression et qui demandent des rĂ©ponses rapides et adĂ©quates. La notion d’urgence de « faire mieux ou faire plus avec moins… » est aujourd’hui encore plus aigĂĽe Ă  cause de la crise Ă©conomique, ce qui entraĂ®ne que le dĂ©bat sur les tâches clĂ©s de l’autoritĂ©, le nombre d’agents et l’augmentation de l’efficience est omniprĂ©sent.

Le colloque d’aujourd’hui et de demain, n’a pas comme but d’entamer la discussion sur les réponses qui doivent être formulées dans les années qui viennent, mais d’examiner les réponses des années précédentes et comment celle-ci ont été vécues sur le terrain.

Pour l’administration fĂ©dĂ©rale, ce sont surtout : un management de qualitĂ© (par l’introduction du système de mandats), une gestion des ressources humaines solide (par l’évolution d’une administration de personnel vers une politique de ressources humaines effective), l’organisation de travail basĂ©e sur des processus (par les BPR’s ou projets de Business Process Reengineering) et la nouvelle structure administrative (la matrice virtuelle de services publics horizontaux et verticaux).

Puis-je me limiter Ă  un « good news - show » sur la rĂ©forme de l’administration fĂ©dĂ©rale ? Sommes-nous arrivĂ©s Ă  bon port ? Evidemment que non. Une image nuancĂ©e s’impose. Des effets secondaires liĂ©s Ă  chaque processus de changement se manifestent. Ils demandent notre attention. Ce sont des conditions importantes pour une amĂ©lioration rĂ©ussie.

Il est essentiel que les services publics soient orientés vers le client.

Toutefois, trop souvent on s’imagine que la relation unique entre le citoyen et l’autoritĂ©, une relation qui se caractĂ©rise par des droits et des devoirs rĂ©ciproques, peut ĂŞtre rĂ©duite Ă  une relation client, produit ou service et fournisseur. Ceci peut ĂŞtre valable pour les entreprises publiques, comme La Poste ou La SNCB (chemins de fers belges), mais n’est pas d’application pour des administrations centrales qui ont souvent un monopole absolu en ce qui concerne leurs missions, comme par exemple le recouvrement des impĂ´ts ou la dĂ©tention d’individus dangereux.

Notre client n’est pas toujours roi, il ou elle ne peut pas devenir un client paresseux qui met ses devoirs de cĂ´tĂ© et demande uniquement ses droits… tandis que nous, de notre cĂ´tĂ©, nous avons l’obligation de faciliter au maximum, parfois mĂŞme automatiser complètement, l’exercice de leurs droits par les citoyens. En tant qu’autoritĂ©, nous avons le devoir important de garder un bon compromis et de bien communiquer Ă  ce sujet.

De mon point de vue, l’attention importante de ces dernières années sur les défis du management dans le secteur public, s’est partiellement effectué aux dépens de la culture d’entreprise. Sans vouloir trop romancer le passé, ni dramatiser le présent, la culture de la fonction publique et l’image que le fonctionnaire se fait de lui-même doivent être reconstruits. Confronté aux principes de management, la fonction publique a été fondamentalement mise en question, démystifiée et parfois ridiculisée.

Les agents et la fonction publique ne peuvent pas ĂŞtre rĂ©duits Ă  un simple aspect d’exĂ©cution. Sinon, le serment solennel et la fiertĂ© « d’être fonctionnaire » seront sapĂ©s. Nous avons besoin d’un nouveau set de valeurs partagĂ©es et d’une mission commune pour l’ensemble de l’autoritĂ© fĂ©dĂ©rale. Ils doivent tenir compte des modernisations et amĂ©liorations du passĂ© rĂ©cent, et simultanĂ©ment indiquer la direction pour le futur.

Les fonctionnaires actuels et les agents potentiels, les nouveaux chercheurs de plus-value, devront pouvoir s’y identifier et s’en inspirer dans leur attitude professionnelle, afin que nous puissions être et rester un employeur unique.

Nos managers publics doivent évoluer pour devenir de vrais leaders, qui sont capable d’inspirer et de motiver leurs collaborateurs sur base de ces valeurs et cette mission partagées. Ils doivent disposer d’assez d’espace afin d’harmoniser leur vision avec la vision politique, pour ensuite diriger d’une façon suffisamment autonome leurs organisations sur base d’objectifs de résultats et d’impact.

La contractualisation de la relation entre la politique et l’administration, dans des contrats de gestion, est un levier essentiel qui confirme la confiance et le respect mutuel entre les partenaires.

Des futures modernisations ou amĂ©liorations rĂ©ussies doivent alors respecter l’équilibre entre investir continuellement dans une meilleure gestion (mesurer pour comprendre, mesurer les rĂ©sultats, calculer les coĂ»ts, le contrĂ´le interne, les amĂ©liorations d’efficience…) et promouvoir la bonne culture publique et la mentalitĂ© de la « res publica ».