Version électronique sur revues.org
Les relations de service constituent désormais un objet de questionnement central au sein du secteur public. L’accroissement important des missions dévolues à la puissance publique n’est pas étranger à ce phénomène. Il y a quarante ans déjà , André Mast parlait de bouleversements au sujet du rôle incombant à la puissance publique : elle était devenue à la fois le pourvoyeur de justice sociale, le régulateur de l’économie et l’ultime recours des intérêts en détresse. La multiplication des champs de l’action publique ne s’est pas faite sans une multiplication des rapports entre les administrations publiques et les citoyens.
Dans le cadre des politiques de modernisation administrative, la relation Ă l’usager et la satisfaction de ce dernier ont pris une place dĂ©terminante et ont impulsĂ© de nombreux changements organisationnels et notamment, une reconfiguration du travail des agents en contact direct avec le public. La prise en compte de la qualitĂ© des relations administrations-usagers est une rĂ©alitĂ© toute contemporaine. Bien plus qu’auparavant, l’administration se sĂ©pare de ses privilèges et de ses prĂ©rogatives exorbitantes du droit commun pour tenter la conciliation de l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral et de l’intĂ©rĂŞt particulier. A l’échelle belge, les contenus du « Plan Copernic » pour l’Etat fĂ©dĂ©ral, de la « modernisation participative par objectifs » pour la CommunautĂ© française et du « plan rĂ©gional de dĂ©veloppement » pour la rĂ©gion bruxelloise tĂ©moignent de l’importance accordĂ©e par les responsables politiques belges aux relations de service. En mettant l’accent de manière plus ou moins prononcĂ©e sur des notions telles que l’amĂ©lioration des fonctions d’accueil du client, la rapiditĂ©, l’accessibilitĂ© et la proximitĂ© des services publics ces politiques tendent Ă introduire des valeurs nouvelles au sein de la sphère publique.
Face à ces transformations, les recherches en sciences sociales se sont tout naturellement penchées sur cette nouvelle manière d’aborder l’usager et sur les conséquences d’une telle réévaluation au sein des administrations publiques, privilégiant ainsi un mode d’analyse plus fin et permettant la mise en évidence des particularités des métiers publics jusque-là peu connues. Plus précisément, l’étude des relations entre les administrations et leurs usagers a éclairé la manière dont l’action publique se déroule localement et concrètement et a contribué à conférer un caractère pluridisciplinaire aux études portant sur l’administration publique mettant fin, de la sorte, à la prédominance des recherches à caractère juridique.
Afin d’illustrer cette double réalité des relations de service, la présente livraison s’organise selon un cadre d’analyse multidimensionnel. En effet, les contributions sélectionnées permettent à la fois d’éclairer la manière dont s’effectue cette nouvelle adaptation à l’usager dans le cadre des réformes administratives, et la manière dont la sociologie de l’administration s’est tournée vers ce nouvel objet de recherche qu’est la relation de service. En outre, ces deux optiques convergent dans la question, centrale, de la place privilégiée qu’occupent actuellement les relations de service au sein de la sphère publique.